Lorsqu'on m'a demandé de réaliser un bac de portière en impression 3D, la difficulté est montée d'un cran comparé à l'impression de pièces de petite taille (au maximum une vingtaine de centimètres) que je réalisais d'habitude.
Cette pièce mesurait 75 cm de long, soit environ trois fois plus que la capacité de l'imprimante utilisée, la Anycubic Photon M3 Max.
Au cours de ce projet, nombre d'erreurs ont été faites, et si cet article vous permet de réaliser plus rapidement des grandes pièces sans avoir envie de jeter votre imprimante à la poubelle, il aura atteint son objectif !
Création de la forme de base
Le client m'a fourni son bac de portière gauche et souhaitait un bac de portière droit, donc son symétrique. Il a ainsi donc fallu recréer en 3D sa pièce à partir de l'originale. Armé d'une règle, d'un mètre et de l'indispensable pied à coulisse, le bac a été recréé dans Fusion360.
Il était crucial de placer les éléments de connexion au bon endroit pour pouvoir fixer le bac à la contre-porte. Ainsi, de nombreuses mesures ont été prises ainsi que des photos pour recréer la pièce.
Conseil : Pour recréer une pièce dont les dimensions sont difficiles à obtenir, une méthode efficace est de recréer deux éléments faciles à mesurer (ici les deux trous/encoches en haut à gauche et droite du bac), puis de prendre une photo du bac et d'utiliser cette image comme référence en alignant les éléments de la photo et les éléments du 3D
Stratégie de séparation
Pour séparer notre modèle en plusieurs parties, la première chose à prendre en compte est la taille d'impression maximale de la machine. Ici, il s'agissait d'une Anycubic Photon M3 Max avec un volume d'impression de 298x164x300mm.
Notre pièce mesure 743x160x85mm. La stratégie de découpage fut relativement simple étant donné qu'uniquement la longueur était trop importante. Le modèle est donc séparé en trois parties d'environ 25cm de long.
Un découpage préférable au niveau de la stabilité de l'ensemble/facilité d'assemblage aurait été une découpe au niveau de la nervure centrale (entre les parties 2 et 3 ci-dessous). Cependant, les pièces résultantes auraient dépassé la taille maximale autorisée par l'imprimante, et il aurait fallu les rediviser pour compenser ce qui aurait éliminé cet avantage.
Ce qu'il ne faut pas faire en divisant son modèle
Une fois le modèle découpé en trois morceaux, j'ai fait trois erreurs:
Résultat, cela a retardé la livraison du bac. Côté finances, ça a été l'équivalent de 70€ et 29h d'impression partis en fumée.
Création d'une interface de connexion
Afin de lier nos parties de bac ensemble, il a donc fallu créer une interface de connexion. Le précédent essai utilisait uniquement de la colle sur une section réduite qui n'a pas tenu le choc. Pour obtenir une connexion précise et solide, nous avons utilisé et une languette de positionnement sur laquelle de la colle serait appliquée ainsi que des vis CHC M2x10 sur tout l'intérieur.
En plus de solidifier l'ensemble le long de sa durée de vie, les vis permettent à la colle de bien s'appliquer sur les surfaces sans se décoller tant qu'elle n'est pas sèche.
Note : Certaines vis comme ces vis M2x10 utilisées sont difficiles à trouver en grande distribution. Vous pouvez les trouver sur des sites spécialisés comme RS Pro :
L'avantage de l'impression 3D résine, c'est sa précision de 0,1mm. Ainsi, tant qu'il ne s'agit pas de pièces mécaniques demandant des ajustement précis, la modélisation des éléments peut se faire (presque) toujours sans tolérances.
Stratégie de positionnement des pièces
Pour le bac raté, tout avait été imprimé en une seule fois. Comment cela a t-il été possible ? En les positionnant de manière non optimisée. Pour tous les faire rentrer dans le volume d'impression, ils ont été placés à la verticale.
Ainsi, lors du "slicing" (La division du modèle en couches d'impression), des grandes zones de résine ont été imprimées d'un seul coup sans structure suffisante pour les retenir.
Ce phénomène est particulièrement visible en haut à gauche de l'animation ci-dessus. On passe d'une matrice de supports à une grande zone de matière. Résultat, au moment où le plateau remonte, la force exercée sur le film FEP de l'imprimante est très importante et la liaison de cette couche à la précédente se déchire.
Couche précédente
Couche trop grande d'un coup
Les liaisons internes et externes à cette géométrie n'ont pas tenu le choc
Alors, comment orienter sa pièce ? Cela dépend de plusieurs paramètres à optimiser en fonction de son besoin:
Modèle de référence
Debout
Côté
Inclinaison de 45°
Inclinaison de 2°
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Temps d'impression | Qualité finale |
Modèle de référence | 181 mL | 0 | 10,9 € | X | X |
Debout | 460 mL | 61 | 27,6 € | 29h | - |
Côté | 442 mL | 59 | 26,5 € | 17h | + |
inclinaison de 45° | 543 mL | 67 | 32,6 € | 29h | ++ |
Inclinaison de 2° | 400 mL | 55 | 24 € | 28h | + |
Cela fait toujours mal au cœur de voir tant de résine partir dans les supports... Mais nous n'avons pas le choix !
Avec ce comparatif, nous pouvons identifier trois solutions valables pour notre partie de bac de portière:
Pour réimprimer le bac, j'ai opté pour une impression sur le côté pour lancer l'impression le soir et récupérer la pièce dans le courant de matinée. L'impression s'est déroulée sans problème.
Maintenant que nous avons déterminé l'orientation de notre pièce, occupons nous des supports en eux mêmes. Dans la plupart des slicers disponibles (ChiTuBox, AnycubicPhotonWorkshop, Lychee...) les supports sont paramétrables.
Dans AnycubicPhotonWorkshop par exemple, nous pouvons choisir des supports légers, moyens ou lourds.
Afin de déterminer quelle structure était idéale, cette pièce de test a été imprimée trois fois avec trois types de supports différents.
Nous avions :
Pour tester la limite de solidité de tous ces supports, la pièce a été imprimée dans un sens non optimal (grande surface sans rien dessous pour répliquer l'erreur commise au point 2).
Les paramètres des supports light ont été modifiés pour avoir une plus grande densité de supports qu'à l'origine.
Résultats obtenus en sortie de machine. De gauche à droite : Supports Heavy, Medium et Light. Les supports Medium n'ont pas tenu et le modèle s'est cassé durant l'impression.
Les zones de défaut, de haut en bas: Supports Heavy, Medium et Light.
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Dimension après UV | Qualité finale |
Modèle de référence | 11,4 mL | 0 | 0,7 € | 56 mm | X |
Supports "Light" | 45,1 mL | 75 | 2,7 € | 56,06 mm | +0,06 mm | - |
Supports "Medium" | 26,4 mL | 57 | 1,6 € | 55,97 mm | -0,03 mm | - - |
Supports "Heavy" | 30,5 mL | 63 | 1,8 € | 55,90 mm | - 0,10 mm | + |
Nous pouvons constater que les deux pièces "Light" et "Medium" présentent des défauts majeurs. La pièce Medium s'est carrément cassée tandis que la pièce Light présente une grande fissure rendant la pièce défectueuse. Seuls les supports "Heavy" ont tenu le coup. En revanche, la pièce est moins précise dimensionnellement avec 0,1mm d'écart en largeur comparé à sa dimension nominale. Ces écarts de dimensions feront l'objet d'une prochaine étude.
Application au bac de portière
Pour étudier un cas réel, penchons nous sur le bac. Dans l'étude du point 2, des supports "Light" ont été utilisés. En essayant toutes les versions, on obtient les résultats suivants:
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Qualité finale |
Modèle de référence | 181 mL | 0 | 10,9 € | X |
Supports "Light" | 442 mL | 59 | 26,5 € | - |
Supports "Medium" | 301 mL | 40 | 18,1 € | - |
Supports "Heavy" | 358 mL | 49 | 21,5 € | + |
Ainsi, les supports les plus avantageux au global sont les "Heavy". Ils utilisent 57ml de résine en plus comparé aux "Medium", mais l'impression a plus de chance de donner un bon résultat qui n'aura pas à être rattrapé en finition.
Le défaut majeur des "Heavy" est leur marque plus importante laissée sur la pièce, mais étant donné qu'un gros assemblage comme celui-ci nécessitera du traitement et ponçage par la suite, ce n'est pas un inconvénient ici.
Avec les résultats de cette étude, nous pouvons comparer la première stratégie d'impression qui a été un échec à cette stratégie d'impression optimisée:
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Temps d'impression | Qualité finale |
Stratégie d'impression 1 | 460 mL | 61 | 27,6 € | 29 h | - - |
Stratégie d'impression optimisée | 358 mL | 49 | 21,5 € | 17 h | + |
Gain | 102 mL | 12 pts de % | 6,1 € | 12 h | +++ |
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Temps d'impression | Qualité finale |
Stratégie d'impression 1 | 546 mL | 64 | 32,8 € | 29 h | - - |
Stratégie d'impression optimisée | 339 mL | 41 | 20,3 € | 17 h | + |
Gain | 207 mL | 23 pts de % | 12,5 € | 12 h | +++ |
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Temps d'impression | Qualité finale |
Stratégie d'impression 1 | 172 mL | 26 | 10,3 € | 29 h | + |
Stratégie d'impression optimisée | 172 mL | 26 | 10,3 € | 17 h | + |
Gain | 0 mL | 0 pt de % | 0 € | 12 h | / |
Stratégie d'impression | Quantité de résine utilisée | % de supports | Prix (Résine à 60€/L) | Temps d'impression | Qualité finale |
Stratégie d'impression 1 | 1178 mL | 57 | 70,7 € | 29 h | - - |
Stratégie d'impression optimisée | 869 mL | 42 | 52,1 € | 2 x 17 h | + |
Gain | 309 mL | 15 pts de % | 18,6 € | - 5 h | +++ |
Conclusion
L'optimisation de la méthode d'impression a permis d'économiser 309 mL de résine pour la même impression, donc de fortement réduire les coûts: -26%. Par la même occasion, la qualité de l'impression s'est améliorée, donnant un rendu plus qualitatif, sans grands défauts d'impression à rattraper.
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